On sera au Kirghizstan. Ben en voilà une bonne idée !!! C’est déjà mieux que le Pôle Nord et pas si difficile à atteindre (en avion je précise…). Donc c’est parti, moteur les gaz, on va aller trouver nos deux baroudeurs chéris là -bas, là -bas.
Oui mais d’abord : « Ah puisque vous venez, ce qui nous fait énormément plaisir, pourriez-vous nous amener deux, trois trucs. » Pas de problème donc on se retrouve en partance pour un pays improbable avec 2 valises container (j’ai même renoncé à prendre mon sac de couchage), un kilo de Gruyère et deux bouteilles de rouge, et du bon siouplait, selon les dernières volontés de nos cycleux assoiffés, voire déshydratés. Maman Micheline prévoit en plus toute la gamme des huiles essentielles nécessaires à combattre les maux de voyage et, à tout hasard aussi, les maux de cœur en prévention des émotions soit d’arrivée ou de départ.
Le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions, disait la grand-mère d’Anaïs. Nous en avons fait la délectable expérience en se disant qu’il serait bien d’arrêter de fumer puisque nos deux cyclistes avaient déjà franchi l’étape en janvier. D’ailleurs, la pause nicotinique à l’aéroport d’Istanbul n’encourageait guère à perpétuer ce vice vu l’état des murs dudit fumoir. Mais comme ils avaient décidé de faire une pause fumigène durant ces vacances, nous nous sommes donc retrouvés à  mégoter comme des Turcs des Camel pas chères.
Donc, nous voilà débarqués à Bishkek, pris en charge par un taxi réservé par nos organisateurs en chef. Et survient le moment des retrouvailles. La larme pointe, le souffle se fait bref et après accolades répétées, on constate qu’ils sont plus facilement entourables par perte de volume mais plus fermes par gain de muscles.
17 jours de bonheur, entrelacés de rencontre et de, découvertes magnifiques. En gros et sans entrer dans l’émotif et le superflu : La Tique (un gentil organisateur français, surnommé par nos soins de cet agréable pseudonyme vu son empathie naturelle), notre guide des premiers 4 jours Aïtbubu et le chauffeur Omur, le site sacré de Manjyly-Ata et ses sources salvatrices pour autant que tu oses en boire une goutte, les gorges Terra Cotta de par la couleur des roches et la digression des oignons sauvages, les cavalcades intempestives à Tuura-Suu, la rencontre du collègue instituteur de Micheline, la joie de l’embourbement et la fine pluie, les raccourcis boueux, le regard de l’aigle sur le nez de Gilles, les questions techniques d’Anaïs sur la fabrication des yourtes, les ballades le long des torrents assourdissants et fougueux, les âpres négociations sur les prix des transports, le chauffeur de taxi aveugle, la marche forcée pour atteindre les bains soufrés d’Altyn-Arachan, la tête de Gagarine quand ils nous a vus, l’abattage rituel d’une vache à l’occasion du décès du grand-père de Ty, la stoïcité de sa mère Gulmira, qui devait accueillir et nourrir pendant 40 jours les proches éplorés, l’origami pour les nuls avec Salamat, l’oncle Rush qui est venu à Fribourg étudier l’anglais à Benedict, les casquettes et couteaux Gruyère distribués au gré des rencontres, le schéma du four à pain, du hammam et surtout les recommandations d’Anaïs pour les détails de construction, les plans d’enfer avec minutage qui nous ont permis de bien faire tout ce que l’on voulait, les baignades dans les eaux salées du lac Issyk-Kul, l’amour de Micheline pour Glouton, notre petit chouchou du camp de yourtes Bel-Tam, les parties de jass avec le regard dubitatif de Gilles sur les variantes de Bopapa et fifille. Et finalement, les sushis de Furusato et la technique anti-larmes de se dire au-revoir sur le gazon de la guesthouse.
Bref que du bonheur avec nos deux chéris voyant qu’ils sont dans le voyage, pas prêts pour deux sous d’en démordre et surtout heureux d’y être.
Inch Allah que la suite soit… nous savons qu’elle sera à leur manière.
Merci pour ce temps, hors du temps.
 — En bus, marshrutka ou taxi
— À pied